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QU Qianmei, l'espace et le temps

  Grande artiste reconnue en son pays, la Chine, QU Qianmei a voulu se rendre au Tibet il y a quelques années et en a été profondément bouleversée. Elle s'est identifiée à la spiritualité portée de manière immémoriale par le peuple tibétain au point de décider de changer sa manière de peindre. Il s'agissait véritablement pour elle d'une deuxième naissance, porteuse de nouvelles exigences pour son art, comme s'il lui fallait répondre au ma?tre spirituel Milarépa qui, du fond du XIe siècle, l'interpelait aujourd'hui : 

  A la frontière du néant et de l'éternel,

  La vue sans limites déjà se perd.

  Je n'ai pas, en sa nature, fixé la réalité.

  Cette réalité, pressentie par QU Qianmei à Lhassa, est celle dite gnas-lugs en tibétain : le niveau de vérité absolue. Une réalité parfaitement naturelle et indicible vers laquelle seul l'art peut nous aider à approcher. Dès lors, son entreprise picturale titanesque (?uvres parfois immenses, porteuses de matières extrêmement denses et lourdes comme la terre de kaolin, le cinabre de Hunan ou le bois rouge…) me para?t répondre à une ambition partagée par les plus importants créateurs de l'histoire de l'art : la temporalisation de l'espace.

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  Retour du Tibet, QU Qianmei a encha?né les chefs d'?uvre à Pékin et près de Paris. L'un des plus remarquables a pour titre Tibet Series A3, 2010 (techniques mixtes, 244 cmX346 cmX5 cm).  Ici, l'implacable développement d'épaisses striures verticales emportées de gauche à droite suggère irrésistiblement le temps animant l'espace qui appartient à la structure même du tableau. Or cela n'est possible que si le temps intervient sous les espèces du mouvement que l'on distinguera de sa trajectoire. Le mouvement est une aventure temporelle, mais il a une trajectoire qui laisse un sillage. Ce sillage est l'enjeu même du travail de l'artiste, dont l'effort fait penser à certains propos de Bergson dans L'évolution créatrice. Le philosophe considérait la trajectoire en tant qu'espace comme ? détente de la durée ?, comme relachement d'un rythme. Qui ne voit que, chez QU Qianmei, la trajectoire de ses sillons n'est en rien l'instrument d'une connaissance (elle a résolument choisi l'abstraction) mais une détermination formelle de l'espace ? Elle n'est pas ce qui se meut, mais le résultat du mouvement. 

  Dans un autre formidable tableau, Tibet Séries A19, techniques mixtes 2010, de 8 mètres 50cmde hauteur, 4 mètres pde largeur et à nouveau (ce n'est pas anodin), 5 - 10cm d'épaisseur.

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​  pour l'exécution duquel il a fallu au peintre utiliser un élévateur, l'espace pictural est temporalisé parce qu'il se donne au spectateur comme un espace structuré et orienté, où des lignes privilégiées faisant penser à de gigantesques traces de pneumatiques dans la terre constituent des trajectoires, grosses d'un mouvement qu'elles accomplissent dans l'immobile. Mais cette ?uvre hors normes ne peut manifester le mouvement prisonnier dans l'immobile que si une conscience vient la déchiffrer et rompre de ce fait le mystérieux sortilège qui tient le mouvement captif. Qu Qianmei exige de nous que nous vivions son tableau. Nous adhérons à sa création, évidemment, de sorte que voici vérifiée la le?on de Kant : le mouvement dans le sujet précède le mouvement dans l'objet. Voilà pourquoi nous percevons une mélodie musicale comme une durée schématisée par le rythme. Voilà pourquoi en toute perception visuelle la simultanéité est médiatisée par la succession. Qu Qianmei guide notre regard de haut en bas dans sa gigantesque composition, elle nous interdit le repos. Alors l'objet pictural s'anime parce qu'il nous a profondément ébranlés. On pourrait dire que l'artiste a réussi à nous émouvoir en nous mouvant.

  Ainsi, tout l'art de Qu Qianmei, qui est aussi une savante chimie où interviennent encore des couches et sous-couches de papier de riz, de laque naturelle, où certaines nuances de couleurs rares sont obtenues grace à la macération de vieilles feuilles de thé du Yunan, tout son art réside, pour reprendre des mots d'André Lhote, dans ce ? geste interne, cette aspiration au signe qu'ont toutes les formes dès que le spectateur est enivré. ?  Oui, l'art de Qu Qianmei est enivrant : vouée à une apparente immobilité par ses matériaux soigneusement choisis et disposés, elle a le pouvoir de faire sourdre de cette tranquillité souveraine une sorte d'impatience de l'?uvre à se faire entendre. Elle déclenche en nous la sensation d'un mouvement véritable qui est un auto-mouvement et non pas un déplacement dans l'espace. Ce mouvement est déploiement d'un sens comme affirmation de soi. Quel sens ? Il ne s'agit pas, bien s?r, d'une histoire ou d'un discours. La signification d'un tableau de QQianmei est inexprimable parce qu'elle réside à la fois dans la forme et dans le contenu de l'objet pictural, et comme l'ame de ce tout vivant. Sa vérité n'est pas dans un rapport de soi à autre chose, mais dans un rapport de soi à soi.

  Prenons un autre extraordinaire tableau de la série Tibet : Séries A1, techniques mixtes 2010 (244 x 244 x 5 cm). 

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  Le mouvement de l'?uvre est ici circulaire. Les masses de matières que l'on dirait en fusion s'ordonnent selon une forme ovale située au centre de la partie supérieure de la composition, et au milieu de cette forme, se détache nettement un cercle inachevé. Le mouvement du tableau ainsi résumé exige que notre regard se pose sur lui un moment, le temps qu'il s'épanouisse comme la musique s'épanouit sous l'oreille, en même temps que par un mouvement inverse nous pénétrons davantage en lui.

  C'est notre regard qui dure, et cette durée est requise par l'?uvre, non pas aussi rigoureusement qu'une composition musicale qui nous plie à son temps propre, mais assez pour que nous ayons le sentiment d'avoir trahi l'?uvre si notre attention a été trop brève. Il faut que nous permettions à l'?uvre d'accéder à elle-même et, peut-être, de délivrer son message qui est à l'évidence logé dans le cercle inachevé, centre à la fois géométrique et symbolique du tableau.

  Dans la roue de l'extase, à la tête,

  Se tient l'assemblée divine de Guhyasamaja

  Qui ne distingue plus la force créatrice des canaux subtils.

  Voici le cercle de la grande félicité.

  Je ne sais rien des intentions de l'artiste, mais j'éprouve sa force créatrice, je distingue peut-être quelques uns des canaux subtils par où passent les modalités de sa création. Et ce que je distingue après avoir longuement regardé le centre de ce tableau carré, ne serait-ce pas le signe du cercle de la grande félicité ?

Jean-Luc Chalumeau

  中译文

  瞿倩梅——时空之间

  在她的国家——中国,瞿倩梅被公认为是越来越具有影响力的艺术家。多年前,她就想造访西藏,而造访后内心为之深深地震撼。她认同藏民以古老的方式承受的神灵修为,以致激发了她的创作灵感。其意义对她来说,不啻于第二次诞生。这新的生命是她艺术新试验的承载者,似乎该由她来回答才智横溢的先哲密勒日巴尊者始于十一世纪末直至今天对她的呼唤。

  在虚无和永恒的边界,

  无限又已然消失的视野,

  我于本性中未肯定过真实。

  由瞿倩梅在拉萨预先感知的这种真实就是藏语中所说的“葛娜思-卢格思”,即“绝对真理的高度”。一种完全自然而又难以言明的真实,只有艺术才能帮我们靠近它。自此以后,瞿倩梅开启的异乎寻常的绘画事业(有时是巨幅大作,承载极其厚重的材料,如高岭土、湖南朱砂或红木粉……),就我看来是回应艺术史上最重要的创造者们分享的勃勃雄心:空间的时间化。

  从西藏回来,瞿倩梅在北京和巴黎近郊连续推出了她的杰作。这些宏篇巨作之一,就是题为《西藏系列 A3 2010》(混合技法,244×346× 5公分)。

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  这里,从左至右挥洒出的厚重条纹肆意的扩展,不可抗拒的暗示,时间使原本属于绘画结构本身的空间动了起来。或者说,时间如果从人们用它的轨迹标示出运动的空间下介入的话,这才是可能的。运动是短暂的偶发事件,但它有一道留下印痕的轨迹。这道印痕甚至是艺术家工作的赌注,艺术家的努力让人想起哲学家贝格森在《造物进化论》中的某些命题。哲学家认为,轨迹作为空间如同“时间的松弛”,如同一种节奏的和缓。欣赏瞿倩梅的画作时,有人认为印痕的轨迹绝对不是对画的一种认知工具(她坚定地选择了抽象化),那空间的明确定义又何在呢?印痕的轨迹不是运动的驱使者,而是运动的结果。

  在另一幅巨大的杰作《西藏系列 A19》中,使用的是混合技法2010,8米高,4米50公分宽,5至10公分厚。

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  为了绘制此画,画家需得用升降机。绘画的空间是瞬间性的,因为它展现给观者的是个有结构性和方向性的空间,在这一空间特有的线条让人想起轮胎在大地上画出的巨大痕迹,构成了在静止中完成的一种运动的粗大轨迹。但这幅超大型的作品,如果有一种感悟来解读这幅画,因此而破译掌控受限运动的神秘魔法,就能展现在静止中的受限运动。瞿倩梅要求我们一定要看她的这幅画。我们赞赏她的创作,当然是依照康德检验过的论证:在主体中的运动先于在客体中的运动。这就是为什么,我们感觉一段音乐旋律,就如同被图解化了的音符的延续。这就是为什么,在整个的视觉感官中,同时性被连续性在不断地间接化。瞿倩梅引导我们的视线在她的巨幅构图中由上而下地梭巡,而不让我们有片刻的停歇。于是绘画客体动了起来,因为它让我们为之深深地震撼。我们可以说,这位艺术家在成功地驱动我们时让我们感动不已。

  因此,瞿倩梅的整个艺术同样也是极富学识的神秘变化,其中使用过一层层的宣纸和衬底、天然漆,还有介入其中的某些稀有颜料的微末色粉,是由云南产的老茶树的茶叶浸泡而得来。用安德烈.洛特的话说,她的整个艺术依托在这种“内在的修为,这种所有的构图在观者的陶醉面前显现出渴望的象征。”是的,瞿倩梅的艺术令人陶醉:她通过对原材料的精心挑选和配置致力于一种表象的静止状态,她有能力使一幅作品想让人们听见其呼喊的焦躁从极致的静谧中释放出来。她对我们宣称,一种真正的运动是一种自主运动,而并非是在空间的挪移,这一论述甚为轰动。这种运动是一种意义的扩展,如同自身的肯定一般。何种意义?当然不是一段故事或一篇演讲。瞿倩梅一幅画的寓意是难以表述的,因为它同时依存在绘画客体的形式和内涵中,如同一个鲜活的灵魂。她的真实不在一种自身和它物的关系中,而是一种自身与自身的关系中。

  让我们来看看另一幅异乎寻常的画作:《西藏系列 A1(混合技法2010(244×244×5公分)。 作品的运动在这里是环绕的。人们所指呈溶液状的颜料主体,依照构图上部之中心的椭圆形按序布列,而椭圆形的中间,一个未完成的园清晰地突兀而出。于是画面被概略了的运动要求我们的目光在画面上停留一段时间,时间会在眼前绽放,如同音乐会在耳边响起一样。同时,由于一种反向的运动,我们会进一步深入画中。

  我们的目光在延伸,而这种延伸是作品的要求,并非如同一首音乐作品让我们折服于它的时间本身那般严格,但如果我们对画作的注意力太短促的话,就足以使我们产生背叛了作品的负罪感。我们应该允许作品进入作品的自身,并且可能释放出它的某些信息,这些信息诚然就在未完成的圆圈中,同时也是作品几何学的和象征性的中心。

  不再区分各神道创造力之大小的

  密集金刚神圣的大会,

  正在欢天喜地氛围中举行,

  这就是伟大的极乐之园。

  我对这位艺术家的意图一无所知,但我能体验到她的创意的力量。我也许从诸神道中鉴别出某些不同,她的创意模式即从此出。而我在长时间注目这幅画作的中心部位之后鉴别出的某些东西,难道不就是伟大的极乐之园的象征吗?

让-吕克.沙吕木

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